Le marchandage de la douleur, vous connaissez, l’avez-vous déjà vécu? Vous savez, ce principe étrange, si, si je sais que vous connaissez.
Ce principe qui consiste à quantifier la douleur selon l’événement. enfin, la douleur, plutôt le droit à la douleur . C’est un bon, comme un bon de rationnement pendant la guerre, sauf que là on parle de douleur, de tristesse. On est autorisé à être triste, mais uniquement pendant un temps imparti.
Pour le décès d’un proche, on a le droit communément à un mois ou deux, pour une rupture deux semaines, Un chien, trois jours... Et ainsi de suite… Enfin je parle dans les grandes lignes là, parce qu’il y a quand même d’autres points qui rentre en compte, on n’est pas des monstres tout de même.
Quels autres points ? C’est une très bonne question. L’âge du chien par exemple, très important, ou le degré de connaissance du proche (un voisin ça vaut moins de points douleur qu’un ami).
Pour la famille, c’est un peu plus long, 6 mois pour le père, un an pour la mère. Les enfants ce n’est pas pareil, on ne touche pas aux enfants.
Encore que çela dépende de l’âge, une femme qui fait une fausse couche n’a pas autant le droit d'être triste qu’une femme qui perd son bébé, et ainsi de suite.
Je crois que c’est quand l’enfant a à peu près 18 mois que la mère à le plus gros « ticket de rationnement tristesse ». (C'est le passage entre le stade de bébé, au stade d'enfant. Perdre un enfant est considéré " moins dure" que perdre un bébé. et perdre un bébé de seulement 1 ou 2 mois, on pense inconsciement que la mère à moins eu le temps de s'y attacher).
Nous vivons dans ce monde et nous acceptons ces règles communes, pourquoi ? Pour ce protéger de la douleur des autres ? Peut-être. Nous accordons un temps limité à nos proches pour qu'ils se remettent d'un drame, si ils sont malheureux plus longtemps, on les considère depressifs.
Donc, dans ce cadre, j’ai parfois le sentiment de ne pas avoir la légitimité de ma tristesse, et donc d’avoir à me justifier
Donc voila, temps limité de tristesse, je sais c’est un peu sauvage, mais c’est comme ça.
Pourtant nous sommes les premiers consommateurs de douleur, nous aimons les effusions de malheur.
Nous regardons tous des émissions sur la douleur de gens parfois très bien, mais peut-être que le filtre de l’écran nous permet de nous en détacher.